Les Olmèques sont la première des hautes civilisations de la Méso-Amérique. Leur nom vient de « olmeca », qui signifie en langue nahuatl « les gens du pays du caoutchouc ». (Au XVIe siècle, « olman » désignait la côte du Golfe, région riche en arbres tropicaux produisant cette matière).
Aujourd’hui, la plupart des spécialistes s’accordent sur le rôle déterminant de cette culture dans le développement des peuples préhispaniques. Des Zapotèques aux Aztèques, en passant par les Mayas et les Toltèques, toutes les civilisations de l’Amérique moyenne vont puiser leurs racines à cette source.

Inauguré en 1986, le musée d’anthropologie de Xalapa, dans l’État du Veracruz au Mexique, abrite une des plus belles collections mondiales d’art préhispanique, et la plus grande consacrée à l’art olmèque. Parmi les joyaux du musée, un extraordinaire ensemble de têtes monumentales.
Inauguré en 1986, le musée d’anthropologie de Xalapa, dans l’État du Veracruz au Mexique, abrite une des plus belles collections mondiales d’art préhispanique, et la plus grande consacrée à l’art olmèque. Parmi les joyaux du musée, un extraordinaire ensemble de têtes monumentales.
Têtes colossales n° 3 et 4. Ces têtes ont été trouvées sur le site de San Lorenzo Tenochtitlan, (État de Veracruz).La tête n° 3 est sculptée dans du basalte. Sur la coiffe formée de quatre cordes attachées, on peut observer la présence de trous correspondant à des mutilations intentionnelles contemporaines à l’époque préhispanique et Olmèque. Cette coiffe se termine par des couvre-joues à pli, probablement de tissu. La partie postérieure de la tête est plate. 1,78 × 1,63 m.
Têtes colossales n° 3 et 4. Ces têtes ont été trouvées sur le site de San Lorenzo Tenochtitlan, (État de Veracruz).La tête n° 3 est sculptée dans du basalte. Sur la coiffe formée de quatre cordes attachées, on peut observer la présence de trous correspondant à des mutilations intentionnelles contemporaines à l’époque préhispanique et Olmèque. Cette coiffe se termine par des couvre-joues à pli, probablement de tissu. La partie postérieure de la tête est plate.
1,78 × 1,63 m.

La tête n° 4 est aussi sculptée dans la roche volcanique. La coiffe (ou le casque) est formée de quatre cordes recouvertes d’une sorte de bonnet à trois glands retombant sur la joue. Ces éléments indiqueraient la position hiérarchique du personnage. La partie postérieure est également plate.
1200-900 avant notre ère. 1,78 × 1,17 m.

Entre 1200 et 500 avant J.-C., soit près d’un millénaire avant les cités mayas, cette population au caractère hétérogène fédère cet immense territoire. Et construit les premières cités de la Méso-Amérique. C’est dans le bassin du fleuve Coatzacoalcos, situé dans le sud du Veracruz, que les archéologues ont exhumé des villes, des résidences d’élite, des ensembles cérémoniels et des sculptures de grande taille, dont les fameuses têtes colossales, toutes retrouvées dans trois des grandes cités olmèques : San Lorenzo, Tres Zapotes et La Venta. Au total 17 têtes dont 10 provenant de San Lorenzo Tenochtitlan.

Tête colossale no 1 de profil. Découverte en 1946 par Stirling, cette tête fut dénommée « le Roi » par ses inventeurs en raison de son aspect majestueux. Elle est la première découverte sur le site de San Lorenzo Tenochtitlan. De toutes les têtes olmèques, celle-ci est l’une des plus belles et des plus réalistes. La coiffe que porte ce dignitaire montre une griffe de jaguar inversée. Le pendant de l’oreille tubulaire qui perfore l’oreille fait le lien avec la coiffe. 1200-900 avant notre ère. 2,85 m × 2,11 m.
Tête colossale no 1 de profil. Découverte en 1946 par Stirling, cette tête fut dénommée « le Roi » par ses inventeurs en raison de son aspect majestueux. Elle est la première découverte sur le site de San Lorenzo Tenochtitlan. De toutes les têtes olmèques, celle-ci est l’une des plus belles et des plus réalistes. La coiffe que porte ce dignitaire montre une griffe de jaguar inversée. Le pendant de l’oreille tubulaire qui perfore l’oreille fait le lien avec la coiffe.
1200-900 avant notre ère. 2,85 m × 2,11 m.

La plus grande collection d’œuvres monumentales

Le musée de Xalapa peut s’enorgueillir de posséder la plus grande collection d’œuvres monumentales (stèles, autels et 7 têtes monumentales) appartenant à cette période d’apogée esthétique. Divisé en six salles et trois espaces ouverts, le musée recèle quelque 27 000 objets d’origine méso-américaine qui sont exposés selon une muséographie organisée en fonction de la géographie de l’État du Veracruz.

Tête Colossale n° 5. Elle possède la coiffe la plus élaborée. Celle-ci représente des pattes munies de griffes de jaguar, félin révéré comme divinité de la pluie et de l’agriculture. Les cercles représentent les taches de sa peau. 1200-900 av. notre ère. 1,86 × 1,47 m.
Tête Colossale n° 5. Elle possède la coiffe la plus élaborée. Celle-ci représente des pattes munies de griffes de jaguar, félin révéré comme divinité de la pluie et de l’agriculture. Les cercles représentent les taches de sa peau. 1200-900 av. notre ère. 1,86 × 1,47 m.

Dans la statuaire olmèque, la présence de la figure mythique du jaguar, qu’il soit anthropomorphisé ou non, est très fréquente. Celui-ci joue un rôle prépondérant dans la pensée religieuse.
Ces têtes, qui mesurent entre 1,47 m. à 3,40 m et pèsent de 6 à 50 tonnes, ont été magnifiquement sculptées dans des blocs de basalte qui proviennent de la zone volcanique de Los Tuxtlas, située à plusieurs centaines de km des centres cérémoniels. Comment ces blocs de plusieurs tonnes ont-ils été déplacés ? Ils étaient transportés par voie terrestre sur quelques kilomètres à l’aide de rondins de bois, puis chargés sur de solides radeaux qui descendaient alors le fleuve Papaloapan pour rejoindre la mer, longer la côte et remonter enfin les fleuves Tonala ou Coatzacoalcos pour arriver sur les sites où les têtes sont sculptées selon la technique de la taille directe.

 Tête colossale n° 7.
Tête colossale n° 7.

Selon les historiens de l’art, les têtes du musée de Xalapa sont les mieux achevées tant d’un point de vue formel qu’esthétique. La différence des coiffes, la diversité des traits laissent penser qu’il s’agit de véritables portraits. La forme du visage est généralement carrée. Les mâchoires sont larges et puissantes. Au-delà des constantes physiques, l’artiste ne se répète jamais et offre bien au contraire une panoplie de faciès d’homme très expressifs. Certains sont impassibles et graves, d’autres sereins, plus rarement rieurs comme sur la tête n°2 de La Venta. Les têtes représentent sans doute des dignitaires. Jacques Soustelle évoquait les « dynastes, prêtres ou athlètes vainqueurs », alors que d’autres pensent aux joueurs de balle. Il semble cependant que l’interprétation la plus plausible soit celle de la représentation de l’élite politique et religieuse olmèque. Pour Caterina Magni, maître de conférences à l’université de Paris IV-Sorbonne, enseignante en archéologie préhispanique, « cette statuaire participe au « culte du gouverneur » qui connaîtra une postérité glorieuse en Méso-Amérique sous des formes variées. »

Des productions artistiques variées

On peut admirer au musée de Xalapa de remarquables pièces de terre-cuite appelées baby-faces, sortes de gros bébés asexués dans diverses positions. Toutes représentent des enfants avec des déformations crâniennes en forme de poire. Terre cuite. 1200-900 avant notre ère.
On peut admirer au musée de Xalapa de remarquables pièces de terre-cuite appelées baby-faces, sortes de gros bébés asexués dans diverses positions. Toutes représentent des enfants avec des déformations crâniennes en forme de poire. Terre cuite. 1200-900 avant notre ère.
Statuette de baby face.

Dans le domaine iconographique, la figure humaine constitue le thème principal de l’art olmèque. Ensuite, on rencontre la figure hybride mi homme-mi félin, et en troisième position, le thème animalier. Outre les œuvres monumentales en pierre et les objets de petite dimension en jade-jadéite, serpentine et obsidienne, les artistes olmèques s’illustrent aussi dans le travail de l’argile et du bois.

On peut aussi voir des personnages anthropomorphes (adultes assez massifs aux crânes rasés en position debout, sculptures de céramiques).

Singe assis typique de la culture olmèque.Ce personnage avec des caractéristiques félines porte une coiffe tombant jusqu’aux oreilles ainsi qu’un pectoral. Les mains ressemblent étrangement à des pattes de félin. Les bandes transversales pourraient avoir une connotation rituelle et astronomique. Los Soldados (Veracruz). 1200-1000 avant notre ère.
Singe assis typique de la culture olmèque.
Urne funéraire olmèque. Catemaco. 300 av. J-C – 200 apr. J-C
Urne funéraire olmèque. Catemaco. 300 av. J-C – 200 apr. J-C

Les haches en jade (pétaloïdes ou rectangulaires) et les masques funéraires en pierre font aussi partie des productions olmèques les plus remarquables.
Dans le domaine artistique, l’héritage olmèque se perçoit dans les cultures postérieures qui continuent à ciseler le jade et à tailler des grands blocs de pierre. « La filiation est sensible à divers degrés. Ainsi, si Tlaloc, le dieu mexicain de la pluie, perpétue clairement les caractères du félin, Quetzalcoatl, le célèbre « Serpent à plumes », les dissimule à l’œil non familier », souligne Caterina Magni.
Ces traits fondamentaux que la première grande civilisation du Mexique lègue aux cultures tardives se retrouvent tout au long des siècles. La continuité culturelle et historique de la Méso-Amérique est, sans aucun doute, exceptionnelle. Et les œuvres du musée de Xalapa témoignent du développement atteint par cette culture encore peu connue.

Histoire des têtes colossales

Tête colossale n° 4. Cette sculpture représente le visage d'un homme d'âge mur, en ronde-bosse. Ses lèvres sont épaisses et légèrement entre-ouvertes. Contrairement à la plupart des autres têtes colossales, l'arrière de la sculpture n'est pas plat mais légèrement bombé. 1,70 x 1,05 m.
Tête colossale n° 4. Cette sculpture représente le visage d’un homme d’âge mur, en ronde-bosse. Ses lèvres sont épaisses et légèrement entre-ouvertes. Contrairement à la plupart des autres têtes colossales, l’arrière de la sculpture n’est pas plat mais légèrement bombé. 1,70 x 1,05 m.
Tête colossale n° 3. Les traits du visage sont très différents des autres têtes de San Lorenzo. Certains pensent qu’il pourrait s’agir d’une femme. La coiffe est composée de 4 rangs de cordes avec des impacts circulaires qui pourraient être des mutilations intentionnelles à l’époque olmèque. 1200 av. J-C – 900 apr. J-C
Tête colossale n° 3. Les traits du visage sont très différents des autres têtes de San Lorenzo. Certains pensent qu’il pourrait s’agir d’une femme. La coiffe est composée de 4 rangs de cordes avec des impacts circulaires qui pourraient être des mutilations intentionnelles à l’époque olmèque. 1200 av. J-C – 900 apr. J-C

La première tête colossale a été découverte fortuitement en 1862 (par un voyageur mexicain du nom de José María Melgar y Serrano) à Hueyapan (actuellement Tres Zapotes), dans le sud de l’État du Veracruz mais, à cette époque, elle avait été attribuée aux Mayas. Elle sera entièrement dégagée en 1938 par Matthew Stirling, le pionnier de l’archéologie de terrain olmèque. Cette tête en basalte, haute d’environ un mètre cinquante et d’un poids approximatif de huit tonnes, est conservée dans le musée de Tres Zapotes.

En 1925, d’autres mégalithes olmèques sont mis au jour, lors du périple de Frans Blom et Olivier La Farge, respectivement archéologue danois et ethnographe nord-américain. Les deux aventuriers explorent la côte du Golfe, puis le sud-est du Mexique délivrant de l’oubli des œuvres d’art olmèques et le site de La Venta (Tabasco). Cependant, ils attribuent ces vestiges remarquables à la culture maya qui fascine les esprits de l’époque. Ce n’est qu’en 1955 que les archéologues, grâce à l’usage de la datation au carbone 14, remettent en cause cette théorie et identifient certaines pièces comme bien antérieures à la civilisation maya. La dernière tête, découverte en 1994 à San Lorenzo Tenochtitlan par une équipe mexicaine dirigée par Ann Cyphers, est très bien conservée et d’une grande beauté plastique. On peut la voir dans le petit musée de Tenochtitlan.

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Texte et Photos : Brigitte Postel