Pourquoi trouve-t-on des sculptures érotiques sur les étais des pagodes de Katmandou ? Quel rapport existe-t-il entre le sexe et le sacré ? Ce livre – Tantra, Théologie de l’Amour et de la Liberté – fruit de plusieurs décennies de recherches sur le terrain, apporte une réponse à ces questions. Voyage au cœur des cultes de l’extase.
Sexualité tantrique
Des couples, voire des trios s’enlacent amoureusement dans les positions les plus invraisemblables. Ils copulent de face, de dos, même de profil ; un assistant parfois encourage les amants de ses caresses ou même s’associe à leurs jeux par sodomie, fellation ou même flagellation.
Là une jeune fille se laisse couvrir amoureusement par un cheval, une autre copule avec un chien, ailleurs une femme les jambes écartées, relevées jusqu’aux épaules, exhibe avec impudeur sa vulve que ses mains ouvrent largement. Deux femmes sont assises à côté d’un homme, l’une le nourrit, l’autre le masturbe, plusieurs personnages s’unissent sexuellement dans des positions complexes, un homme avec plusieurs femmes ou des hommes avec une seule femme, des groupes se livrent à des pratiques d’un sadisme exacerbé, un religieux à chignon et longue barbe s’apprête à pratiquer le coït avec une jeune fille …
Non, il ne s’agit pas d’un film pornographique. Ces images à la beauté étrange, à l’érotisme déroutant, à l’obscénité affichée et provocante sont sculptées sur les poutres de soutien de charpente des élégantes pagodes aux toits d’or qui se dressent un peu partout dans la vallée de Katmandou.
Ces sculptures qui choquent ou en tous les cas intriguent même les Népalais contemporains ont été imaginées et sculptées à une période où la vie et les mœurs étaient bien différents des habitudes actuelles.
Même si le Népal n’a jamais été colonisé, l’influence anglaise et le victorianisme puritain, qui s’est si bien adapté à la rigueur brahmanique indienne, y a aussi imprégné les mœurs actuelles.
Dans les temps plus anciens, des pratiques « dionysiaques » étaient encore fréquentes lors de fêtes annuelles qui brisaient les tabous habituels pour quelques heures et faisaient partie intégrante des rituels religieux et d’une sorte de nécessité sociale car la population peu nombreuse et les épidémies dévastatrices justifiaient un encouragement à la reproduction. Les images percutantes et d’un réalisme cru en disaient plus aux observateurs du XVIIe siècle que de longs discours sur le sujet, dans un contexte, répétons le, où la natalité était une nécessité face à une mortalité infantile très importante avec pour conséquence un peuplement insuffisant.
Le sexe, source de rédemption
Cet essai ne prétend pas résoudre tous les mystères des pagodes ni ceux du tantrisme. Il eût fallu commencer par expliquer toutes les subtilités du tantrisme hindou, puis celles du tantrisme Vajrayana bouddhiste, ce qui nous aurait entraîné trop loin sur des considérations générales des deux religions. Le point de vue est essentiellement de souligner les convergences entre les tantrismes hindous et bouddhistes plutôt que d’en valoriser les différences.
Nous avons privilégié l’éclairage sur des doctrines radicales et aux pratiques parfois choquantes, mais qui, en fin de compte, n’ont pour but que l’élévation spirituelle et la libération des chaines de la réincarnation qui enferment les âmes dans une sorte de noria spirituelle de laquelle elles ont bien du mal à s’échapper.
Texte : Eric Chazot
Photos : François Guenet
Eric Chazot est un écrivain spécialiste du Népal où il a vécu de 1975 à 1988 et où il retourne plusieurs fois par an. Il est considéré comme un des meilleurs experts en art himalayen. Il a eu la chance de rencontrer un vieux sage Newar qui lui a donné des explications sur des connaissances et pratiques tantriques tenues ultra secrètes.
Ce beau livre, illustré de 108 magnifiques photos, révèle le patrimoine exceptionnel d’un art sacré et de rites réservés à de rares initiés. C’est aussi un précieux témoignage de la dimension tantrique portée par l’iconographie érotique de certaines pagodes népalaises de la vallée neware.
Ce livre est d’autant plus précieux qu’il recèle des témoignages uniques de la statuaire des temples et sanctuaires des capitales des anciens royaumes, Katmandou, Bhaktapur et Patan, détruits par le séisme de 2015.
François Guenet est photographe dans le domaine de l’Art et des Civilisations pour de grands magazines français et étrangers. Il a une connaissance approfondie du Népal où il a réalisé de nombreux reportages depuis une quarantaine d’années. Il travaille également comme photo-journaliste et a couvert de nombreux conflits au Moyen-Orient.
Une partie de son oeuvre est visible sur http://www.divergence-images.com/francois-guenet/
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